Pétition des élu·es français·es contre la vidéosurveillance algorithmique de la loi JO

Le Parlement doit rejeter l’article 7 de la loi Jeux olympiques 2024 !

Notre page de campagne contre la loi JO

Cette pétition s’adresse aux élu·es (conseillers municipaux, départementaux, régionaux, députés, sénateurs). Si possible, merci de nous indiquer votre signature depuis votre adresse mail officielle, afin de nous assurer qu’il s’agit bien de vous en écrivant à petition@technopolice.fr (merci de préciser votre mandat — par exemple « conseillère municipale de Paris (75) — et, le cas échéant, le parti auquel vous êtes rattaché·e). Nous refusons toute signature provenant de l’extrême-droite. La liste complète des plus de 250 signataires est à retrouver ici

À travers l’article 7 du projet de loi relatif aux Jeux Olympiques 2024, le gouvernement entend légaliser la vidéosurveillance algorithmique (VSA). Il s’agit ainsi de satisfaire aux demandes des industriels et de certains responsables du ministère de l’Intérieur pour permettre, via une simple autorisation préfectorale, le couplage de l’Intelligence artificielle aux caméras de vidéosurveillance disposées dans les lieux publics ou placées sur des drones. Prenant pour prétexte les Jeux olympiques organisés à l’été 2024, l’article 7 autoriserait ces technologies de surveillance massive pour toutes les manifestations « sportives, culturelles ou récréatives », allant des matchs de Ligue 1 aux marchés de Noël en passant par les festivals de musique. Le tout au nom d’une prétendue expérimentation de deux ans devant s’achever en juin 2025, imposant à toutes les personnes qui assisteront à ces événements de devenir à la fois cobayes et victimes de ces algorithmes sécuritaires.

Qu’est-ce au juste que la VSA ? Il s’agit d’un type de logiciels consistant à automatiser l’analyse des flux de vidéosurveillance pour déclencher des alertes à destination des forces de police ou de sécurité dès lors que des « comportements suspects » sont repérés. Il peut par exemple s’agir du fait de rester statique dans l’espace public, de marcher à contre-sens de la foule, de se regrouper à plusieurs dans la rue ou encore d’avoir le visage couvert. Ces logiciels peuvent aussi suivre automatiquement le parcours d’une personne dans un territoire à l’aide d’attributs biométriques tels que la taille, le fait d’être perçu comme homme ou femme, ou encore la couleur de ses vêtements. Demain, il suffira de croiser ces technologies avec divers fichiers pour pratiquer massivement l’identification par reconnaissance faciale — une fonctionnalité que proposent déjà de nombreuses startups et industriels positionnés sur ce marché, à l’image du logiciel Briefcam, dont les logiciels sont déployés dans plus de 200 communes françaises.

Si le gouvernement instrumentalise les Jeux olympiques en prétendant « expérimenter » la VSA, cela fait en réalité des années que des expérimentations ont lieu sur le territoire français, et ce en toute illégalité comme l’a lui-même reconnu le ministre de l’Intérieur. L’État a lui-même directement financé nombre de ces déploiements au travers du Fonds interministériel de prévention de la délinquance, de l’Agence nationale de la recherche ou du programme d’expérimentation lancé par le ministère de l’Intérieur pour Paris 2024 (lequel a par exemple conduit à tester la reconnaissance faciale lors du tournoi de Roland-Garros en 2021).

Quant aux prétendues garanties apportées par le gouvernement aux libertés publiques dans le cadre de ce projet de loi, elles apparaissent tout-à-fait dérisoires au regard des enjeux soulevés par la VSA. Contrairement à ce que prétendent ses promoteurs, ces technologies ne sont pas de simples outils d’« aide à la décision » : l’adoption de l’article 7 du projet de loi Jeux olympiques s’assimilerait à un véritable changement d’échelle et de nature dans la surveillance de la population, installant dans nos sociétés démocratiques des formes de contrôle social qui sont aujourd’hui l’apanage de pays autoritaires comme la Chine. C’est ce qu’explique la CNIL lorsqu’elle écrit que l’article 7 « ne constitue pas une simple évolution technologique de dispositifs vidéo, mais une modification de leur nature », ajoutant qu’un tel déploiement, « même expérimental, (…) constitue un tournant » . La Défenseure des droits met également en garde Réponse de la Défenseure des droits à la consultation de la CNIL contre la VSA : selon elle, « le changement de paradigme » induit par le passage des « caméras de vidéoprotection “classiques” vers des dispositifs aux capacités de détection et d’analyse algorithmiques poussées est extrêmement préoccupant ». Elle insiste sur « les risques considérables que représentent les technologies biométriques d’évaluation pour le respect [des] droits »

Il est aussi particulièrement choquant de constater que, de l’aveu même de ses promoteurs, ce basculement vers la surveillance biométrique de l’espace public est motivé par des considérations économiques. Sous couvert d’expérimentation, la loi prépare la banalisation de ces technologies tout en permettant aux acteurs privés de peaufiner leur algorithmes avant leur généralisation. Lorsqu’on sait que l’achat d’une seule caméra coûte à une collectivité entre 25 et 40 000€ (sans la maintenance ni les logiciels d’analyse), on comprend aisément que la vidéosurveillance et son pendant algorithmique constituent une immense manne financière pour les industriels du secteur : 1,6 milliards d’euros de chiffre d’affaire sur l’année 2020Pixel 2022, page 96 consultable ici : data technopolice rien qu’en France. Au niveau international, le marché devrait plus que doubler d’ici 2030 pour atteindre près de 110 milliards de dollars. Faisant fi du risque d’erreurs et d’abus en tous genres, certains promoteurs de la VSA expliquent dores et déjà qu’après la détection de « comportements suspects », les pouvoirs publics pourront amortir ces technologies en automatisant la vidéoverbalisation. Il y a donc fort à parier qu’une fois ces technologies achetées au prix fort, une fois des dizaines de milliers d’agent·es formé·es à leur utilisation, il sera pratiquement impossible de faire marche arrière.

Conscient·es du risque que fait peser la vidéosurveillance algorithmique sur la vie démocratique de nos sociétés, nombre d’élu·es de par le monde ont décidé d’interdire son usage. En décembre 2022, suite à l’adoption d’une résolution du Conseil municipal, la ville de Montpellier est devenue la première commune française à interdire la VSA. Elle a ainsi rejoint la liste des municipalités en Europe et aux États-Unis qui ont proscrit une telle surveillance biométrique sur leur territoire. En réponse à une pétition signée par des dizaines de milliers de citoyens à travers le continent, le Parlement européen discute lui aussi d’une interdiction de ces technologies.

Nous, élu·es de la République, refusons à notre tour le recours à la vidéosurveillance automatisée et le projet de société de surveillance qu’elle incarne. C’est pourquoi nous appelons chaque parlementaire à voter en conscience contre l’article 7 de la loi relative aux Jeux olympiques.